Au départ de la sixième étape entre Bayonne et Luchon, Odiel Defraye est en tête du classement général. Eugène Christophe, un des favoris pour la victoire finale, pointe à 5 minutes, Marcel Buysse à 10 minutes et Philippe Thys à 23 minutes.

Au sommet de l’Aubisque, Christophe, passe en tête devant le belge Philippe Thys. Dans l’ascension du Tourmalet, il est rattrapé puis double par le belge, qui passe le premier au sommet.
Mais dans la descente vers Sainte-Marie de Campan, Christophe est renversé par une voiture suiveuse. La fourche de son vélo est brisé. Selon le règlement, il doit réparer seul ou abandonner. Il descend alors à pied les 14 kilomètres qui le séparent de sainte Marie de Campan en portant son vélo sur l’épaule.

Tour de France 1913 Eugene Christophe

Au village, il trouve une forge et commence la réparation de son vélo, sous la surveillance d’Henri Lecomte, commissaire de course. Il brase une barre de fer qu’il faut ensuite enfoncer dans le cintre, avant de resserrer le tout à l’aide de goupilles.
Deux heures après le début de la réparation, un des officiels demande à Henri Desgrange la permission d’aller manger un morceau. « Si vous avez faim, mangez du charbon…Je suis votre prisonnier et vous resterez mes geôliers » dit Eugène Christophe.
Au bout de quatre heures, sa réparation terminée, Christophe repart. Mais c’est trop tard pour espérer revenir sur Thys qui passe en tête au sommet de l’Aspin et du Peyresourde avant de s’imposer à Luchon, terme de cette étape de 326 km, devant Buysse et Garrigou.
Christophe termine l’étape à 3h50′ du vainqueur du jour. Pour lui le Tour de France est perdu, mais il est rentré dans la légende.

Tour de France 1913
Une plaque commémore cet événement à Sainte-Marie de Campan.

Au classement général, il terminera septième à un peu plus de 14h du vainqueur de ce Tour 1913: Philippe Thys.

Eugene Christophe Tour de France 1913Eugène Christophe
De 1906 à 1925, Christophe participe à onze Tour de France. Il ne le gagnera jamais, mais il est le premier coureur à avoir porté le célèbre maillot jaune, le 18 juillet 1919. Il sera victime d’un nouveau bris de fourche dans l’avant-dernière étape du Tour 1919, du côté de Valenciennes, alors qu’il tient la tête du classement général avec 28 minutes d’avance sur le Wallon Firmin Lambot. Il effectue de nouveau sa réparation et arrive plus de deux heures et demi après Lambot qui remportera le Tour. La malchance s’acharne décidément sur lui, car lors du tour 1922, il casse à nouveau sa fourche dans l’étape Briançon-Genève, alors qu’il était passé en tête au Galibier et avait toutes les chances de reprendre le maillot jaune. Il termine une fois encore le Tour à la 7e place.