Le Tour de France et les Pyrénées
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Le Tour de France et les Pyrénées
Chaque été, lorsque le Tour de France s’approche des hautes terres pyrénéennes, la course change de visage. L’altitude grimpe, les lacets se tendent, et le cyclisme retrouve sa dimension héroïque. Aspin, Tourmalet, Aubisque, Peyresourde… Ces noms ne sont pas de simples cols : ce sont des chapitres vivants de la légende sportive, où s’éprouvent la volonté, le talent et l’endurance des plus grands. Avec leur majesté farouche et leur relief sans concession, les Pyrénées ne se contentent pas d’accueillir le Tour : elles en redessinent chaque fois le scénario.
L’année 1910 marque leur entrée fracassante dans l’épreuve. Dès lors, ces montagnes deviennent le théâtre de moments inoubliables : exploits éclatants, scènes cocasses ou tragédies silencieuses. Nombre d’éditions s’y sont jouées, tant le destin du maillot jaune semble suspendu à ces pentes redoutées. Les Pyrénées ne sont pas un simple passage : elles sont le creuset où s’éprouve la grandeur.
Tout commence avec Octave Lapize, qui franchit le col d’Aubisque en crachant sa colère : « Vous êtes des criminels ! » Il inaugure une longue lignée de héros venus défier la rudesse pyrénéenne. Depuis, ces cols ont vu se croiser les regards de légendes : Anquetil et Poulidor à l’Aspin, Hinault et Zoetemelk au Pla d’Adet…
D’une génération à l’autre, ces sommets imposent une forme de rite initiatique, où le cycliste touche à l’épopée. Plus récemment, le panache de Tadej Pogačar a rallumé la flamme du mythe, offrant au public des offensives d’anthologie, dignes des plus grandes heures.
Entre souffrance et dépassement, les Pyrénées écrivent l’une des plus belles histoires du Tour de France. Chaque virage, chaque sommet, résonne d’une mémoire collective. Ici, la route ne ment jamais : elle révèle les champions. Dans cette saga centenaire, les Pyrénées ne sont pas de simples montagnes. Elles sont l’âme du Tour.
Les origines du Tour de France
C’est au jeune journaliste Géo Lefèvre que revient l’idée d’une grande course cycliste à travers la France, destinée à faire parler du journal L’Auto et à surpasser son concurrent Le Vélo. Le 19 novembre 1902, lors d’un déjeuner avec le rédacteur en chef Henri Desgrange, il expose son projet. Enthousiasmé, Desgrange valide l’idée : le Tour de France est lancé.
La première édition a lieu en 1903. Imaginée comme un coup de publicité audacieux, elle relie quelques grandes villes sur un parcours essentiellement plat. Pourtant, dès le départ, l’épreuve rencontre un engouement populaire inattendu…
Le Tour de France et les Pyrénées
Le Tour arrive pour la première fois dans les Pyrénées en 1910. Certaines de ces étapes pyrénéennes ont été le théâtre d’exploits, d’anecdotes mais aussi de drames. Souvent, la victoire finale s’y est jouée, faisant entrer les Pyrénées dans la légende du Tour.
En 1910, les coureurs s’attaquent pour la première fois aux montagnes pyrénéennes, sur des routes de terre, au guidon de vélos sans vitesses. La première étape pyrénéenne relie Luchon à Bayonne, en passant par l’Aspin, le Tourmalet, l’Aubisque et l’Osquich. Octave Lapize remporte l’étape et entre dans l’histoire en traitant les organisateurs de « criminels ». Cette étape marque le début d’une relation passionnée entre le Tour et les Pyrénées.
Au fil des décennies, les Pyrénées deviennent un moment-clé de la Grande Boucle. En 1964, le duel entre Anquetil et Poulidor au col de Portet-d’Aspet électrise la France entière. En 1975, c’est là, au Pla d’Adet, que Bernard Thévenet commence à détrôner Merckx. En 1983, Robert Millar s’impose à Luchon dans une étape dantesque. En 2010, à l’occasion du centenaire de l’entrée des Pyrénées dans le Tour, les coureurs revivent les grands cols de la légende, avec une ferveur intacte.
Et plus récemment, les Pyrénées ont encore pesé dans la balance : en 2022, Tadej Pogačar et Jonas Vingegaard s’y livrent un duel haletant, avec des attaques sur les pentes du Peyragudes et de Hautacam. Le panache du Slovène, même s’il échoue à détrôner le Danois, démontre une fois encore que les Pyrénées restent l’arène où les grands champions forgent leur légende
Les cols des Pyrénées et le Tour de France
Dès leur première apparition en 1910, les cols des Pyrénées changent radicalement la physionomie du Tour de France. Ce ne sont plus de simples étapes de transition : les montagnes deviennent les arbitres du destin, les lieux où se jouent les plus grandes pages de l’épreuve. Certains de ces cols, par leur difficulté, leur histoire ou les drames qu’ils ont vu se dérouler, sont devenus de véritables monuments du cyclisme.
Le Tourmalet, d’abord. Avec plus de 90 passages depuis 1910, il est le col le plus fréquemment escaladé dans l’histoire du Tour. Symbole absolu de la montagne pyrénéenne, il conjugue pente rude, altitude (2 115 m) et légende. C’est là qu’Octave Lapize lâcha son fameux « Vous êtes des criminels ! » lors de l’ascension inaugurale. Depuis, tous les grands noms y sont passés : Coppi, Bahamontes, Merckx, Hinault, Contador, Pogačar… Le Tourmalet est à lui seul une mémoire vivante du Tour.
L’Aubisque, autre géant historique, a longtemps été redouté pour ses descentes techniques et sa célèbre corniche en balcon, vertigineuse. Il est souvent associé au col du Soulor dans des combinaisons redoutables, redessinant le classement général dès la mi-étape.
L’Aspin, plus court mais souvent explosif, est aussi entré dans la légende, notamment lors du duel Anquetil-Poulidor en 1964. Le Peyresourde, tout proche, a souvent servi de tremplin pour des attaques décisives en direction de Luchon ou du Val Louron.
Plus récemment, des cols comme le Port de Balès, le col de Portet, ou encore la montée vers Hautacam ont apporté une dimension spectaculaire au Tour. Le col de Portet, souvent comparé à l’Alpe d’Huez pour sa difficulté, a offert en 2018 un duel mémorable entre Chris Froome et Nairo Quintana. Hautacam, théâtre de l’éclatante victoire de Bjarne Riis en 1996, reste l’un des plus sélectifs.
Mais les Pyrénées, ce ne sont pas que des noms célèbres : ce sont aussi des ascensions imprévisibles, des routes étroites bordées de spectateurs en liesse, et une ambiance unique. Contrairement aux Alpes, où les grandes stations dominent, les cols pyrénéens conservent souvent une certaine rudesse, un charme plus sauvage, plus brut.
Chaque année, lorsque les coureurs s’y engagent, c’est comme si les fantômes des anciens champions revenaient hanter les lacets. Ces cols ne se gravissent pas seulement avec les jambes : ils exigent du panache, du mental, et une part de folie.
Des coureurs des Pyrénées au Tour de France
Les Pyrénées ne sont pas seulement un décor majestueux ou un terrain d’épreuve pour les champions venus d’ailleurs : elles ont aussi vu éclore de grands coureurs, enfants du pays, qui ont marqué l’histoire du Tour de France.
Dans les années 60, Raymond Mastrotto, natif du Béarn, s’impose comme l’un des meilleurs coureurs français de sa génération, remportant une étape du Tour et endossant le maillot jaune en 1962. Autre figure emblématique : Bernard Labourdette, originaire de Lurbe-Saint-Christau, auteur d’une victoire inoubliable à La Mongie en 1971, au terme d’une échappée solitaire dans les pentes du Tourmalet.
On n’oubliera pas non plus la famille Lapébie : Guy, le père, a participé aux premiers Tours d’après-guerre, tandis que son fils Roger, brillant rouleur et grimpeur, remporte le Tour de France en 1937.
Dans les années 80 et 90, c’est le Béarnais Gilbert Duclos-Lassalle, coureur au style combatif et populaire, qui fait vibrer les foules. Bien qu’il ne brille pas particulièrement dans les étapes de montagne, son attachement à la région et ses deux victoires dans Paris-Roubaix font de lui une figure respectée du cyclisme français.
D’autres coureurs, parfois moins médiatisés, mais tout aussi représentatifs de la culture cycliste pyrénéenne, méritent d’être cités. Robert Cazala, originaire de Bellocq, a remporté quatre étapes du Tour de France et porté le maillot jaune durant six jours. Hubert Arbès, né à Lys, et Jean-François Abadie, de Tarbes, ont également défendu les couleurs du Sud-Ouest dans les pelotons professionnels. Jean Fontan, bien connu pour son abandon dramatique alors qu’il portait le maillot jaune en 1958, est une autre figure marquante. Et Matthieu Ladagnous, né à Pau, a incarné la fidélité et la rigueur dans le peloton moderne, toujours dévoué à ses leaders dans les grandes courses.
Aujourd’hui, la relève est incarnée par Bruno Armirail, originaire de Bagnères-de-Bigorre. Spécialiste du contre-la-montre, il s’est illustré en 2023 en portant le maillot rose du Giro, mais reste profondément enraciné dans ses Pyrénées, où il s’entraîne régulièrement. Sa présence dans le peloton du Tour rappelle que ces montagnes ne se contentent pas d’accueillir les plus grandes batailles : elles en forment aussi les guerriers.
Bibliographie
Christian Laborde
Échappées belles sur le Tour de France dans les Pyrénées
Enfin, un livre de photos consacré au Tour de France dans les Pyrénées ! Marie-Blanque, Aubisque, Soulor, Tourmalet, Aspin, Peyresourde…, des lieux, des noms de cols connus par tous les amoureux du vélo de France et d’ailleurs, tous sont liés aux exploits des cyclistes de la Grande Boucle. Chaque année en juillet, qu’il fasse grand soleil, qu’il pleuve ou qu’un brouillard tenace enveloppe la montagne, ils sont des centaines de milliers de passionnés ou de simples curieux à passer une journée en plein air, à attendre des heures durant le passage du Tour de France. Après la caravane, place aux héros de légende… place aux Géants du Tour de France !
Pierre Carrey
Légendes du Tour de France
100 ans de Pyrénées
1910-2010 : cent ans d’exploits, de bonheurs ou de drames. Pendant un siècle, les forçats de la route ont fait des Pyrénées un haut lieu du Tour de France, un magnifique terrain de jeu où les plus grands ont forgé leur légende. Le premier fut Octave Lapize, le vainqueur de la toute première étape.
Passionné de cyclisme, Pyrénéen, le journaliste Pierre Carrey a enquêté pendant près de deux ans pour nous raconter la véritable histoire du Tour sur les pentes du Tourmalet, de l’Aubisque ou de l’Aspin. Il a consulté 2 500 articles et interviewé coureurs ou descendants de champions pour rétablir certaines vérités et nous dévoiler des anecdotes incroyables et inédites.
Année par année, il nous narre une histoire originale, tantôt drôle, tantôt dramatique. Lapize, Fontan, Vietto, Bartali, Anquetil, Merckx, Thévenet, Ocana, Hinault, Jalabert et de nombreux oubliés de la Grande Boucle sont montrés sous un jour nouveau. Pour éclairer ses propos, l’auteur nous présente également les classements de toutes les étapes pyrénéennes avec le nom de tous les champions qui sont passés au sommet de chaque col.
Dominique Kérébel
Le tour de France et les Pyrénées
Créé en 1903, sous la forme de grandes courses à étapes, le Tour de France va prendre une nouvelle dimension sept ans plus tard : Alphonse Steines, journaliste et âme damnée d’Henri Desgrange, décide de durcir l’épreuve en lui faisant prendre de l’altitude. En 1910, le Tour se heurte aux routes des Pyrénées, qui ne sont alors que des sentiers à vaches que les coureurs appellent » le cercle de la mort « . Et c’est ainsi que depuis un siècle, la Grande Boucle, devenue l’incontournable rendez-vous de juillet, fait d’exploits et de larmes, franchit, dans un sens comme dans l’autre, le Tourmalet, l’Aubisque, Aspin ou Peyresourde, dans un premier temps, puis Portet d’Aspet, Luz-Ardiden, Pla d’adet… ou encore les cols du pays basque. Cols mythiques qui sont devenus des lieux de légendes et de tragédies. D’Octave Lapize, le vainqueur de l’édition 1910, jusqu’au dernier lauréat, A. Contador, l’auteur retrace, aux travers d’anecdotes et de témoignages, l’épopée des forçats de la route, magnifiquement illustrée par de nombreuses photos, inédites pour la plupart.
L’histoire officielle du Tour de France
L’Histoire officielle du Tour de France raconte l’épopée centenaire du Tour, de la première course sensationnelle de 1903 jusqu’à nos jours, en passant par l’âge d’or des grands champions. Richement illustré de centaines de photographies
autour des grands moments et des coureurs emblématiques, ce récit nous emmène sur les traces de La Grande Boucle et ses 21 étapes.
Revivez les réussites épiques des légendes du Tour, d’Eddy Merckx, Bernard Hinault et Miguel Indurain à Chris Froome, Mark Cavendish et aujourd’hui Jonas Vingegaard ou Julian Alaphilippe. Aux côtés des meilleurs cyclistes de la planète,
plongez dans le sillage des équipes mythiques du Tour, confrontées aux étapes contre-la-montre, en ligne ou de montagne (Alpes et Pyrénées) jusqu’aux Champs-Élysées.
Entre traditions et innovations, (re)découvrez les évolutions de l’une des épreuves sportives les plus suivies au monde. Les documents d’archives, maillots, anecdotes historiques ou encore résultats et statistiques détaillés de chaque année du Tour, ici rassemblés, raviront tous les fans de cyclisme.





